Soirée Foie Gras Party du Samedi 7 décembre 1996 18H00
J’ai lancé les invitations une bonne semaine avant la date. L’endroit sera le même qu’il y a deux ans: CARA, Paris 14eme. J’ai trouvé que Paris était plus pratique qu’Igny. Toutes les personnes contactées, dans le premier jet, étant prêtes à venir, je me suis retrouvé avec une liste de 15 voire 16 personnes. Je me suis longtemps demandé si je n’avais pas vu un peu grand. Avec Suzel nous sous sommes mis d’accord sur une ambiance feutrée sur fond de couleur pourpre. La veille de la date j’ai fait des courses pour acheter du foie gras, du champagne, du vin, du pain… j’ajoute le rouge avec des serviettes, des bougies, un spot, bref, toute l’intendance. Le seul travail a été la confection d’un gros tiramisu. Je ne suis pas certain du résultat. Le matin je suis retourné acheter quelques bricoles. Bien que j’ai en référence la fête d’il y a deux ans, où il y avait eu 8 personnes, je ne suis pas sûr de moi quant à la quantité de choses à fournir, tant en provisions qu’en nécessaire de table. J’ai tout mis dans 2 cartons avec, en plus, quelques sacs. Je m’habille en costume avec un polo bordeaux pour être dans les tons.
Giorgio
J’arrive chez CARA un peu avant 17H00 et je monte toutes mes affaires du parking. Suzel, la maîtresse de ces lieux, avait un rendez-vous et avait prévu de venir après 18H00. Elle avait rangé l’appartement, passé l’aspirateur et sorti tout ce qu’elle avait comme vaisselle. Je me sens contrarié, tout d’abord, parce que je ne pense ne pas avoir tout le temps nécessaire. J’installe petit à petit les plateaux, les saladiers, les bougies, le spot rouge. Je laisse un chandelier de bougies oranges sur la commode où j’ai disposé une corbeille pleine de mandarines. A 18H00 je suis presque prêt. Lorsque Suzel puis Gianfranco arrivent je suis en train de rechercher les meilleures dispositions possibles. Le gros tiramisu ne tient pas sur une étagère du frigo. Suzel se débrouille pour trouver un moyen. J’ai pris avec moi le camescope. Je filme un tout petit peu au début et puis… j’oublie. Je ne filmerai plus que la fin de soirée. Dommage. C’est sans doute parce que je n’ai pas de souvenirs de la soirée, que je déciderai le lendemain d’en écrire l’histoire. Toujours préoccupé de savoir si tout le monde s’amuse je ne mangerai, finalement, pas du tout de foie gras. Je remarque que je n’ai pas faim. Ce n’est que vers la moitié de la soirée que je me sers ma première flûte de champagne. Un peu de fromage et deux bons verres de l’excellent vin rouge de Gilles me remettent en appétit. Arrive le moment réclamé par beaucoup de monde. Le tiramisu. Je commence par servir des petites parts puis de plus en plus grandes, car je vois qu’il y en a. Il est très réussi car il est resté très ferme. Je suis content car tout le monde semble apprécier. Je tâte le terrain pour savoir si on va jouer à quelque chose. L’accueil est plutôt tiède, mais il suffit de laisser mûrir l’idée. En attendant je retrouve dans ma boite un bozo-bozo. Là, contrairement à ce qui s’était passé il y a une semaine, c’est un succès. Le petit bout de bois passe de main en main. J’avais apporté à tout hasard un paquet de cartes de pictionnary que j’ai détourné en jeu de mime. Je suis heureux de voir que rapidement tout le monde fini par se mettre en cercle pour jouer. Dans ce jeu chacun y met du sien, moi, j’aime bien y mettre de la poésie. Je tiens à faire participer ceux qui, précisément, ne participent pas. Souvent à genoux, pour être plus près du public que je vise, j’y mets un tel entrain que dans un geste hardi je renverse un plateau d’épluchures de mandarines. Il est bientôt 01H30 du matin lorsqu’un mouvement séparatiste voit le jour. Il est temps pour tous, de rentrer.
Suzel
Elle arrive vers 18H00, et peut, finalement, me donner un coup de main pour finir de préparer. Je compte un peu sur elle, mais elle m’a bien prévenue qu’elle voudrait être une invitée comme les autres. Elle case, tout de même, tout ce qu’elle peut Dieu sait où et volette de l’un à l’autre pendant toute la soirée. Je cille lorsqu’elle ouvre tout de suite la boîte de chocolats de Magda alors que nous ne sommes qu’en début de soirée. Mais, après tout, cette boite, sera retrouvée vide en fin de soirée. L’impatiente s’empresse d’ouvrir la bouteille de vin blanc envoyée par Monika, à peine ai-je remercié Magda pour elle. C’est pour offrir un pendant au champagne, dit-elle. En fait, j’interprète cela comme un prétexte pour s’en servir, tout de suite, un verre. La rusée profite de l’assistance pour passer le passage du CD de voix de haute-contre qui la fait vibrer. Elle demande le silence, je lui dis qu’elle peut lever le son. Je me dis, qu’après tout, surtout en pleine nuit, c’est une musique prenante. Elle fera, plus tard, un bis et puis nous aurons pitié des voisins. Lorsque arrive l’heure du fromage je fais plusieurs annonces, sans résultat. Elle, ne s’embarrasse pas pour autant et, sert le plateau. Au jeu de mime, c’est certainement une des plus inventives. Mais, après minuit, l’oiseau commence à manifester des signes de fatigue. C’est dans son caractère. Elle quitte le cercle et entreprend de faire la vaisselle en prévision du départ des personnes ayant prêté des verres et des couverts. Elle termine la soirée en répétant, embarrassée, que c’est Giorgio qui a tout fait, comme réponse aux remerciements sincères qui accompagnent les départs.
Gianfranco
Il arrive, ponctuel, en premier invité, alors qu’il m’avait dit qu’il serait là plus tard dans la soirée. Il porte une petite caisse pleine de vaisselle comme je le lui avais demandé. Tout est bien emballé séparément dans du papier journal. Une partie sera effectivement utilisée. Il arrive au moment où je suis en train de prendre mes marques et s’assoie pour attendre les autres invités. Une fois arrivés, par petits groupes, ils remarqueront après lui, qu’ils ne se voient, tous ensemble, qu’une fois par an, à la même occasion. Il prend place, en début de soirée, dans un des deux fauteuils d’où on a du mal à se lever. Il le laissera, plus tard, à Magda mais pendant toute la soirée, il ne va pratiquement pas changer de place, assis dans le clan albanais. Il va d’ailleurs partir dans un grande tirade d’enrôlement, méthodique, avec Genç. Avec Magda il prend des nouvelles de Monika et demande sa nouvelle adresse. Comme toute le monde hésite à se servir au buffet et pour débloquer la situation, il se lève pour couper le bloc de foie gras en tranches énormes. Il va se montrer intéressé par le CD de musique que Suzel va passer et en note le titre. Sa voix portante va se faire entendre toute la soirée surtout au jeu de mime ou des chuts répétés vont alterner avec des éclats de rire appuyés. Ces interprétations de mots sont prosaïques mais aussi, techniques, et le globe terrestre, comme origine de tout, aura son importance.
Magda
Elle arrive avec Genç et Iona. Elle amène une bouteille de vin de la part de Monika et une jolie boite de chocolat. Je me dis que, encore une fois, ils n’ont pas pu venir les mains vides, tout simplement. Il y a aussi, à ma demande cette fois, un sac avec des coupelles et des verres à champagne, qui seront vite utilisés. Elle me ramène aussi deux rouleaux de scotch qu’elle dit ne pas pouvoir garder chez elle. La nouvelle arrivée à l’air assez distante et va s’asseoir dans un des deux fauteuils de la salle et ne plus en bouger. Elle va vite faire couple avec Iona et je les suspecte de n’avoir parlé qu’en albanais, toute la soirée. Le buffet est trop loin de son ambassade et elle va demander à se faire servir. Lorsque les plus entreprenants se seront, tant bien que mal, servis, je me suis plus particulièrement occupé d’elle et de Iona, vissées sur leurs deux fauteuils. Je surveillais leurs assiettes et leurs verres s’ils venaient à se vider. Au jeu du mime, la réfugiée commence par faire mine de pas être intéressée, mais comme toute le monde fini par se mettre en place pour jouer, le cercle se referme sur elle. Comme elle a l’air de sourire, quand même, aux mimiques, je rends complice l’assistance pour tricher en sa faveur et la pousser à se montrer au devant de la scène. Même si, à partir de ce moment là, il y a un vrai brassage des places ce sera elle, boudeuse, qui hésitera le plus à quitter sa cachette. Elle en renverse même son verre de champagne. C’est attendrissant de la voir, comme avec les autres albanais, ne pas comprendre tous les mots à mimer et amener cette petite touche de fraicheur exotique. Je tiens à ce que le jeu se conclue avec elle.
Genç
Il arrive avec Magda et Iona. Il porte un gilet, qui me fait irrésistiblement penser à un cow-boy. Très discret comme d’habitude je le remarque au bout d’un moment en grande discussion avec Gianfranco. Comme je suppose qu’il apprécie le bon vin, c’est à lui que je donne le dernier verre de la bonne bouteille de Gilles. Contrairement à Magda il ne va échanger que quelques mots de circonstance, en albanais je suppose, avec Iona. Le reste du temps il me semble le voir plus dans l’ambiance. Au jeu de mime, après un moment d’observation, il accroche très bien au point que je n’essaye même pas de l’aider. L’albanais, qui parle français avec un accent italien, mime les mots avec un accent de croupier de casino.
Iona
Elle arrive avec Genç et Magda. Au départ, la belle, a le front bas, mais son visage s’éclaire au fur et à mesure que la soirée avance. Principalement en discussion avec Magda, je m’inquiète une ou deux fois de savoir si elle s’ennuie. A part un verre d’eau en fin soirée, Cendrillon n’osera rien demander. Un petit plateau sur ses genoux, je la vois, picorer avec plaisir. Et pourtant, au jeu de mime, contrairement à Magda, je l’entends souffler deux ou trois mots qui montre sa volonté de participer. Bien sûr, comme pour Magda, elle n’échappe pas aux transgressions des règles du jeu pour se retrouver, carte en main, face a un public très attentif. Bien que choisissant son mot, elle n’a pas beaucoup de mal à faire passer son message. Souriante toute la soirée, elle a toujours manifesté de la satisfaction aux sollicitations, malgré quelques regards interrogateurs en direction de Magda. Avant de partir elle reçoit les compliments, mérités, de Suzel sur son manteau et la façon qu’elle a de le porter.
Christian
Il arrive avec Isabelle. C’est un des couples qui va le plus bouger dans la soirée. Il apporte une bouteille de champagne, que je n’avais pas prévu, mais qui ne sera pas de trop. Elle va partir d’ailleurs en premier puisqu’elle est plus fraîche que les autres qui sont encore au frigo. Je lui présente Genç, que professionnellement en fait, il est censé connaître. Toujours souriant, aussi à l’aise en retrait que dans une discussion il adopte une conduite simple. Ce sommelier qui s’ignore, évite soigneusement la tournée de vin rouge mais apprécie volontiers tout le reste de ce qui est présenté sur la table, à laquelle il fini par s’accouder. Au jeu de mine, ce grand esprit déducteur, va être, inexplicablement, un des derniers à accrocher. Ce qui aura pour effet de beaucoup l’amuser. Comme il intervient moins souvent que Genç, je vais faire semblant de l’aider, pour l’aiguillonner. Avant de partir, il me parle d’opportunités de nouveaux jobs et me dit qu’il va tester les renseignements qu’il a pris et me tiendra au courant. Ce sera, une fois n’est pas coutume, la seule incartade informatique de la soirée.
Isabelle
Elle arrive avec Christian. Ils ont pu laisser les enfants à la baby sitter. Elle apporte, contre toute attente, un petit cadeaux pour moi et Suzel. Deux charment petits livres. Je trouve mon cadeau bien choisi. C’est elle qui va être le plus dans l’esprit buffet en se levant pour se servir et n’hésitant pas à demander, de sa voix calme, ce dont elle a besoin. C’est la seule, avec Suzel, à apprécier la salade verte et la sauce, bien qu’elle ne soit pas faite maison. En outre, intéressée par ce que j’ai servi à Gilles elle en demande aussi. Je suis content de voir qu’elle a bien profité de tout ce qui était offert. Au jeu de mime, elle fera souvent mine de manger en décrivant les mots, et elle cherchera souvent à s’asseoir. Je ne saurais pas si cela était le plus du à la peur de se mettre en évidence ou simplement à la fatigue du début de la grossesse de son troisième enfant.
Gilles
Il arrive avec Marie-Christine. C’est, aussi, un des couples qui va le plus bouger dans la soirée. Ils vont faire toutes les combinaisons possibles avec le couple Christian et Isabelle. Il arrive en chemise de soie. C’est dommage je n’aime pas le contact de la soie. Cet animal s’en montre satisfait. Il a amené une bonne bouteille de vin rouge 1987. Comme je sais qu’il a une bonne cave j’avais semé cette idée dans son esprit. Je le vois discuter pratiquement avec tout le monde, assis ou debout, verre à la main et sourire mutin. Il papote en intimité mais, aussi, n’hésite pas à apostropher une autre personne, telle que Diaraye, à l’autre bout de la pièce. Après le foie gras, voyant qu’à son ventre il manquait quelque chose, je lui fais une salade de tomates et poisson arôme crabe. Son vin rouge a un franc succès avec le fromage, et nous évoquons ensemble les épisodes où mes haltes chez lui coïncidaient avec l’ouverture d’une bonne bouteille. Au jeu de mime, le garnement se montre théâtral. On le voit souvent bomber le torse et ses attitudes ne manquent pas de truculence. Il en ri.
Marie-Christine
Elle arrive avec Gilles. Son fourreau rouge est tout à fait dans les tons de la soirée. Il y a deux ans elle s’était décommandée. Depuis nous en avons souvent parlé et aujourd’hui elle est contente d’être là. Je suis attentif à savoir si tout se déroule parfaitement pour elle. Elle me confirme, de sa voix tranquille, et à plusieurs reprises qu’elle se régale de foie gras et champagne. Quand je lui ressert du tiramisu, c’est avec une louche. Elle se dit gavée. Ensemble nous papotons sur tout et sur Gilles. Devant lui, jaloux, je manifeste une fois de plus, à elle, mon désir de profiter de ses atouts. Je tire parti de sa présence en lui demandant la traduction du titre du morceau du CD que passe Suzel. Pour ce que je veux faire de cette musique, cela me convient. Nous parlons céramique, verre de Venise, verre de Spilimbergo. L’érudite est assez discrète au jeu de mine, je l’entends, toutefois, asséner gentiment quelques bon mots, en particulier à mon encontre.
Diaraye
Elle arrive en dernier. Mais ça, nous ne le saurons que plus tard, puisque deux autres personnes prévues ne viendront finalement pas. Elle a l’air très fatiguée. Elle ne prononcera pas beaucoup de mots pendant la soirée, conservant une attitude réservée. Mangeant avec un appétit d’oiseau, elle se montrera toujours très timide Au jeu de mime elle va, contre toute attente, souvent deviner Genç et réciproquement. Cela montre, peut-être, qu’il y a une convergence entre leurs deux modes de penser. Comme il reste une petite part de tiramisu, je suis déçu que personne n’en veuille. Elle commence par la demander pour Fatoumata, puis change d’avis et me la laisse. N’ayant plus de train en cette heure matinale, je la raccompagne chez elle.
Caroline
(Absente) Bien qu’elle m’ait confirmé sa présence par téléphone le jour même, elle n’est pas venue et n’a pas rappelé. Je lui ai laissé un message vers 21H00 sur son répondeur. Quelques jours plus tard, elle me dira qu’elle avait eu un soudain coup de blues.
Danièle
(Absente) Je me demande si elle, par contre, n’attendait pas une confirmation da ma part. En tout cas elle n’est pas venue. J’ai laissé aussi un message vers 21H00 sur son répondeur. Elle, par contre, se montrera plus tard catastrophée car, chose qui ne lui ressemble pas, elle a carrément oublié le rendez-vous.
Alberto
(Absent) Il m’a appelé le jour même pour me dire que, à cause d’une greffe de gencive en milieu de semaine, il ne se sentait pas en forme pour venir. J’avais insisté et je lui avais demandé de m’appeler le soir même. Il a confirmé, ce soir, qu’il ne venait pas.
Fatoumata
(Absente) Elle m’a appelé, deux fois, plusieurs jours avant la soirée. La première fois pour me confirmer sa venue, puis une deuxième fois juste après pour me dire qu’elle ne pourrait pas venir car elle avait du travail, semble-t-il.
Monika
(Absente) Bien que j’ai longuement insisté pour qu’elle vienne, elle avait dit depuis le début qu’elle ne viendrait pas. Elle nous a fait parvenir par Magda une bouteille de vin blanc que nous avons bien bu à sa santé.